Adrien Couturier, un homme de dessin

Ne le cherchez pas parmi les flâneurs de la place de la Mairie ou parmi les peintres du dimanche. C'était une figure locale de la première moitié du vingtième siècle.

Il était peintre en bâtiment-décorateur, mais également artiste peintre. Il maniait le pinceau comme d'autres la langue et il a laissé un grand nombre de peintures artistiques. Adrien Louis Emmanuel Couturier, pour l'état civil, était né à la Couarde, Île de Ré, le premier septembre mil huit cent soixante-douze. 

Appelé sous les drapeaux, il fit son service militaire dans notre région et c'est ainsi qu'il fit connaissance avec sa future épouse, Jeanne Guichard, dont les parents tenaient une boutique d'épicerie.

Libéré de ses obligations militaires, il exerça son métier dans notre cité. En mai 1899, il ouvrit une boutique, rue de la République, face au commerce de ses beaux-parents (à l'heure actuelle, sa boutique est un magasin d'optique).

Il se maria le deux septembre mil huit cent quatre-vingt-dix-neuf, les époux logèrent au-dessus du magasin jusqu'à leur décès. Ils n'eurent pas d'enfants.

De son oeuvre picturale, il ne subsiste que quelques réalisations, malgré une très nombreuse production de natures mortes, paysages marins de l'île de Ré, rues de Sorgues, marines. Il mourut le 2 novembre 1953. 

Curieusement, Adrien Couturier est connu des historiens d'arts contemporains du monde entier, non pour sa peinture, mais en sa qualité de gérant d'immeubles. Au début du vingtième siècle, il était chargé de percevoir les loyers de la villa des « Clochettes » pour le compte de monsieur Perrin. Au cours de l'année 1912, un étrange locataire s'installa à la villa, un nommé Pablo Ruiz, dit Picasso. Ce dernier peignit une fresque murale dans le salon, « détériorant le papier peint ». Pour s'éviter un procès qu'il aurait perdu, Picasso chargea son ami Braque de payer les dommages à monsieur Couturier qui lui en délivra reçu pour solde de tout compte. Bien longtemps après, cette fresque, conservée grâce au nouveau papier peint qui la recouvrait, fut détachée du mur par un amateur éclairé et elle fut vendue. Monsieur Fustier, qui fut longtemps instituteur dans notre commune, racontait volontiers avoir vu cette œuvre, au cours de l'année 1955, dans une galerie parisienne.

Extrait de la 15ème édition des Etudes Sorguaises "Sorgues : images du passé" 2004