Tous deux juifs du pape
Avant de connaître Jacob et Léa Cavaillon, il est utile de rappeler qui étaient les « Juifs du Pape ».
La présence juive en Gaule méridionale remonte à 70 ans après J.C., donc postérieurement à l’exil qui suivit la destruction du Temple de Jérusalem par l’empereur romain Titus.
En 1309, le roi de France, Philippe le Hardi, vendit le Comtat Venaissin à l’Église romaine, à compter de ce moment-là les juifs commencèrent à trouver dans les États pontificaux un asile de relative sécurité.
Ils s’installèrent essentiellement dans ce que l’on appelle les « Quatre Saintes Communautés » : Avignon, Carpentras, Cavaillon, l’Isle sur Sorgue, où ils vécurent dans des carrières jusqu’au rattachement du Comtat Venaisin à la France le 14 septembre 1791.
Les familles implantées dans le Comtat portaient des noms de villes, attestant de l’ancienneté de leur établissement : Meyrargues, Milhaud, Vallabrègues, Monteux, Carcassonne, Cavaillon. On trouve également des noms d’origine biblique souvent francisés : Abram, Mossé (Moïse). *
Le personnage qui nous intéresse, Jacob Cavaillon vit le jour à Carpentras le 23 novembre 1818, il était le fils de David Aaron Cavaillon, décédé à Sorgues le 13 mai 1838, et de Nousse Cavaillon, ses parents résidaient à Sorgues, rue des Remparts. Il épousa Léa Lyon, née à Carpentras le 19 septembre 1809, âgée de vingt-six ans, demeurant à Bédarrides.
La célébration civile du mariage se déroula le 10 septembre 1840, en présence de Gaston d’Albignac maire de Sorgues à six heures du matin survivance des anciennes brimades envers les juifs.
Les témoins tous de Sorgues se nommaient : Joseph Bezet, serrurier, François Thore, perruquier**, Jacques Ripert cultivateur, et Antoine Bergier marchand quincailler.
Les Cavaillon père et fils étaient marchands drapiers, rue des Remparts. Marchand drapier désignait le commerçant qui vendait des draps, pour le distinguer de l’ouvrier qui les fabriquait, appelé drapier drapant.
Les juifs comtadins se défiaient des alliances étrangères. Ils préféraient se marier entre eux. Ils avaient, en général, l’habitude de fiancer leurs enfants dès le berceau. Il pouvait en résulter beaucoup d’ennuis pour l’avenir. Plus d’une fiancée se faisait enlever la veille de son union. Mais la plupart des jeunes filles courbaient l’échine sous la volonté des parents.
Jacob Cavaillon décéda à Sorgues le 28 janvier 1886. Son fils Adolphe 1843-1914 fut un médecin généreux, il exerça toute sa vie à Carpentras. En souvenir du dévouement qu’il porta à ses patients, Carpentras lui dédia une place****
Sources :
* (Texte tiré d’un article de Robert Milhaud, publié par l’Association Culturelle des Juifs du Pape.)
Le perruquier, au dix-neuvième siècle, était celui qui fabriquer des perruques, coiffer, et raser.
***(Essai de mœurs comtadines israélites nouvelles orangeoises par Mlle Noémie Mossé page 47, publié par l’Association Culturelle des Juifs du Pape)
****(Portraits comtadins-17e-18e-19e — siècles, volume 4, par JP.Chabaud. Jean Paul Chabaud a accompli un énorme travail d’information dans ce livre, à lire absolument.
Raymond Chabert
Ci-dessous l'intérieur de la synagogue de Carpentras