Au début du vingtième siècle, pour toutes les lavandières l’eau n’était pas facilement accessible.

Pour nettoyer le linge, la majorité allait sur les berges de l’Ouvèze, sur les bords des biefs de la Sorgue, et d’autres aux lavoirs.

Quatre fonctionnaient, un nommé « lou barjadou » près de la place de la République, un derrière l’église, un autre au Pontillac, un quatrième, impasse de l’orme (Le Rhône se confie, page 165, Robert Bézet).

Ils figuraient tous dans la partie ancienne de la commune, leurs constructions étaient antérieures au vingtième siècle.

Celui dont nous allons retracer l’histoire commence en 1949. La municipalité étudiait la possibilité d’établir un lavoir public au sud de l’agglomération qui en manquait. Le 29 novembre, des discussions eurent lieu avec Jean Albar, négociant en charbon. Elles n’aboutirent pas, le prix offert était trop élevé.

La proposition était irréalisable, l’équipe échevinale envisagea d’acquérir des treize ayants droit de Paul Antoine Rieux et Pauline Perrin décédés, l’immeuble en mauvais état sis à l’angle de l’avenue Paul Floret, et de la rue Mireille, quartier de la Peyrarde.

Mais, le déroulement du dossier ne se passa pas comme nos édiles auraient pu le souhaiter. Ils eurent en face d’eux un mouvement hostile d’une partie de la population sorguaise. Robert Bézet écrivait à ce sujet « … Celui-ci fit couler beaucoup d’encre, car il fut au centre des démêlés lors d’une élection municipale. Il est regrettable que Gabriel Chevalier ne l’ait pas connu ; il nous aurait certainement fourni un second Clochemerle… »

Mais, ce n’était pas tout, cette famille nombreuse était marquée par le ressentiment entre ses membres. La parenté se divisait en deux camps, l’un composé de neuf personnes, l’autre de quatre.

La mésentente conduisit l’affaire devant tribunal, qui ordonna la vente aux enchères. Le 2 août 1950, par adjudication la commune acquit la maison.

Pour aboutir à cette vente, sept professionnels de la justice intervinrent : Me. Hugues, notaire à Sorgues, deux avoués, un expert immobilier, deux juges, et le procureur de la République. C’était ce pour quoi Prosper Mérimée écrivait « … une mauvaise affaire rapporte plus à un homme de loi qu’une bonne cause… »

Sur la maison arasée, la commune construisit un lavoir bétonné. Il comprenait un bassin de lavage pour douze personnes, un autre de rinçage, séchoir, des latrines publiques hommes et femmes, le tout couvert d’une toiture plate.

L’eau, fourniture municipale, était amenée par tuyauterie. En 1954, elle fit maçonner une canalisation souterraine, destinée à l’écoulement des eaux usées jusqu’au collecteur situé à l’angle de l’avenue Gentilly et Floret. Les premières années, très appréciées par la réalisation, les ménagères y effectuaient toutes leurs opérations de blanchissage.

FINI LE TEMPS DES BUGADA à L’ANCIENNE

À compter de l’année 1960, les industriels Lincoln, Philips, Laden, etc... se sont intéressés à la construction de machines à laver électriques.

Leurs produits pouvaient s’intégrer par leur étroitesse dans un logement. Elles étaient relativement bon marché, faciles à installer.

Cette arrivée sur le marché entama un lent déclin de la vie du lavoir. Il conduisit à son abandon autour des années 1982/83. À partir de ce moment-là, le bassin ne fut plus alimenté en eau. Les dernières utilisatrices furent mesdames Gianotti et Dardenne, témoins d’une époque qui ne connaissait pas ou à peine l’électricité.

La construction a été vendue le 24 septembre 1997.

*Dans le dictionnaire Provençal-Français, année 1840, le docteur Honnorat mentionne « peirada » prononcer peiràde, chemin pierreux, couvert de pierres. (tome 2 page 1597)