Ce quartier se délimite par la gare, l'avenue Gentilly, l'avenue Floret jusqu'à l'allée de Brantes, l'avenue Cessac et la rue Mireille.
Dans les années 1930 à 1970-80, c'était un « vrai petit village » où étaient établis : épiceries, cafés, tabac, coiffeur, grossiste en fromages, boulangeries, horloger et lunetier, boucherie, peinture, grossistes en bois et charbon, négociants en vin (établissements David et Foillard décrits dans la précédente publication), un artisan électricien, une usine de cannes, une scierie, des ateliers de ferronnerie et mécanique, et même, au cours des années 1950-70, une clinique d'accouchements.
Tous les habitants de cette partie de la commune formaient une joyeuse « colonie ». Je me souviens de tous ces petits marchands chez lesquels nos parents nous envoyaient acheter le pain, le lait, de la petite épicerie... Nous connaissions toutes les personnes qui nous servaient.
En partant de la gare, sur la gauche de l'avenue Gentilly, étaient installés un commerce de bois et charbons tenu par monsieur Albar puis l'épicerie de monsieur et madame Marcel Combe dont le fils, surnommé « Cocotte », était bien connu des turfistes. Après l'impasse Combe, on remarquait l'imprimerie Giraud, devenue un bureau de tabac (actuellement Lou Fumaïre), la boulangerie de monsieur et madame Graille, l'atelier de peinture de monsieur Simonetti et la boucherie de monsieur et madame Plan juste à l'angle du croisement avec l'avenue Floret.
En continuant après cette intersection, on découvrait une représentation symbolique de la croix de Jésus-Christ élevée sur un soubassement en pierres de taille, ensuite un bief de la Sorgue qui allait jusqu'à l'avenue d'Avignon puis, dans une pièce d'une maison bourgeoise, au rez-de-chaussée, une agence de la Banque Chaix gérée par monsieur Pontcharra. On y accédait par un ponceau qui enjambait l'eau.
Sur la droite de cette avenue, on longeait l'atelier de mécanique et serrurerie de monsieur Veyrun, puis un commerce de charbons et le moulin à huile de monsieur Parasachi. A la fermeture du moulin, ses enfants créèrent une épicerie au même endroit (actuellement, un cabinet de pédiatre).
À l'angle du croisement avec l'avenue d'Avignon, monsieur Camel avait un commerce de matériaux de construction (actuellement restaurant).
Sur la gauche de l'avenue, en face du commerce de monsieur Parasachi, la boulangerie actuelle existait déjà, tenue par monsieur Rouvière.
Dans l'avenue Floret, sur la droite après le croisement avec l'avenue Gentilly, plusieurs commerces se suivaient : l'« épicerie fine » de monsieur et madame Gautier (commerce créé par Paul Bompart), le salon de coiffure pour hommes de monsieur Jean-Marie Gallas, le Bar-Tabac « La Pipe » (actuellement bar de l'Ovalie), l'atelier de réparation de montres et horloges de monsieur Girard et un magasin de fruits et légumes dans les années 1940-1950.
Après le croisement des avenues Floret et Cessac, en allant vers l'allée de Brantes, un commerce de vieux métaux était tenu par monsieur Malen, suivait une usine de cannes (pour lattis, plafonds ou planchers) dirigée par monsieur Christin. Elle a brûlé dans les années 1950. L'usine de fabrication de landaus pour bébés, créée par messieurs Rivolier et Jugnet en 1914, fonctionna au bout de cette avenue de 1925 à 1956. Elle était suivie d'un atelier de mécanique et serrurerie appartenant à messieurs Isnard et Héraud, qui fut repris par monsieur Paulin après la guerre de 39-45. En face de cet atelier se trouvait le passage à niveau qui permettait d'accéder au chemin de Brantes (passage à niveau supprimé à cause des T.G.V.).
L'avenue Cessac, parallèle à l'avenue Gentilly (de la gare à l'avenue d'Avignon) avait aussi une boulangerie tenue par monsieur Martin et son fils et un grossiste en fromages, monsieur Quénat Henri (voir photo). Après le croisement avec l'avenue Floret, sur la gauche fut créée dans les années 1950 une petite clinique d'accouchements qui était dirigée par mesdames Calment et Farrugia, toutes deux sages-femmes. De nombreux petits Sorguais y naquirent, elle fut fermée en 1971 ou 72.
Tout près de la clinique, une sorte de cour qui communiquait mal avec l'extérieur (que l'on avait baptisée « la Cour des Miracles ») s'ouvrait sur l'atelier de serrurerie de monsieur Mariani. À l'extérieur, donnant sur l'avenue, était établie l'épicerie de monsieur et madame Spina, reprise ensuite par madame Plonka. En face, sur la droite de l'avenue, on remarquait le commerce de vins de Léopold Ranc, la scierie de monsieur David, l'atelier voisin de pièces de précision de messieurs Vincent et André. Monsieur Gensoulen puis Max Pierredon continuèrent cette activité. Enfin, un marchand de bois et charbon, monsieur Fontana, occupait l'angle du croisement avec la route d'Avignon.
En 1945, les Établissements Héraud Frères s'installèrent dans l'avenue, à l'endroit où se dresse la caserne des pompiers. Ils fabriquaient de la chaudronnerie, des charpentes métalliques et produisirent des chauffe-eau électriques. Enfin, un atelier de bobinage, tenu par monsieur Boérie terminait l'avenue sur ce côté gauche.
L'histoire du quartier de la Peyrarde peut se résumer par la création d'amitiés formidables. Tout le monde se connaissait et vivait en bonne intelligence. Je ne me souviens pas vraiment de disputes, surtout chez les enfants : pas de chapardages, toujours corrects et respectueux des anciens. La vie se déroulait avec les joies et les peines partagées de chacun. Lorsqu'un ennui survenait chez quelqu'un, l'entraide et l'amitié fonctionnaient immédiatement : on se trouvait là pour aider de son mieux à passer ce « mauvais cap ».
Il y avait des festivités afférentes au quartier, notamment « la Fête de la Gare » qui se déroulait à la fin de l'été. C'était une minifête votive, avec manèges pour enfants et pour les grands, stands de tir et de loterie et, bien sûr, le bal ! L'ambiance était très festive, chacun participait.
Sur la place de la gare, à l'emplacement de l'actuelle supérette DIA, une grande remise servait de dépôt de roseaux et de cannes pour les établissements Christin installés dans l'avenue Floret. Mais, au début de la guerre, en septembre 1939, ce local fut réquisitionné par l'armée et nettoyé pour y loger les militaires en partance pour le front.
Nous avons le plaisir d'avoir la photo du chef de gare de l'époque, monsieur Rollet, accompagné de son épouse et de son fils Robert. Il fut le témoin attristé de la formation et du départ du « Train Fantôme » le 18 août1944.
Enfin, donnant sur la place, le café-restaurant de la Gare avait le privilège de recevoir les rassemblements pour les banquets des associations diverses. Les conscrits, par exemple, après leur passage au conseil à Bédarrides, chef-lieu de canton, se réunissaient au restaurant pour terminer la journée par de joyeuses agapes. D'autres associations, telles que le Réveil Sorguais Fanfare, y tenaient leurs banquets annuels. Je me souviens de celui de 1938, j'avais participé avec mon père, j'avais alors 10 ans et je jouais du tambour. (photo).
Pierre EYNAUD
Extrait de la 22è éditions des Etudes Sorguaises "Vers la communauté contemporaine sorguaise" 2011